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(Auteur: Thorsten Stegemann – Telepolis)

La critique du rapporteur des Nations unies, Vernor Muñoz, quant au système scolaire allemand (1), est virulente, mais la plupart des pédagogues et politiques de la formation ne se sentent pas concernés.

Il y a un an, l’envoyé spécial pour le droit à la formation des Nations unies, Vernor Muñoz, était en visite en Allemagne pour se faire une idée d’ensemble sur le paysage de la formation, en tenant compte des spécificités du système scolaire en place. Son rapport d’état officiel pour l’assemblée générale des Nations unies est présenté le 21 mars 2007 et est actuellement au mains du gouvernement pour observation et commentaires.

Les conclusions de Muñor ne pouvaient être tenues secrètes, aussi peu que sa visite controversée en février 2006, et elle n’arrivaient non seulement dans les étages de la direction politique, mais aussi à l’agence presse allemande qui ne se faisait pas prier de les rendre publique.

Dans son rapport, Vernor Muñoz demande avec insistance à l’Allemagne de reconsidérer le système scolaire de multiples niveaux et de supprimer les différences fédérales dans l’organisation et la mise en oeuvre. La répartition prématurée d’élèves d’age moyen de dix ans sur des parcours scolaires différents serait « extrêmement sélectif », « atypique  » en comparaison internationale et sinon n’existe plus qu’en Autriche. De cette façon les élèves « ne pourraient pas être évalués convenablement » et seraient particulièrement désavantagés quand ils sont issus de familles de faibles ressources, d’immigration ou quand ils sont handicapés. En outre, Muños émet des doutes que les pédagogues qui ont la responsabilité du parcours de l’élève « ont toujours été suffisamment formés ».

En plus, l’envoyé spécial critique la corrélation entre le succès de la formation d’un côté et l’origine sociale de l’autre, ce qui a été constaté par d autres nombreux observateurs. Dans aucun autre pays industriel, cette corrélation serait aussi marquée et mènerait finalement à un nombre bas de bacheliers, à un nombre élevé d’élèves sans aucun diplôme et à une absence de perspective de personnes peu qualifiées sur le marché du travail.

Le « droit à la formation » ancré dans la charte des Nations Unies n’est, d’après l’évaluation de Muños, pas appliqué, notamment pour les enfants de parents demandant l’asile ou de personnes vivantes illégalement en Allemagne. Les Länder comme Bade-Wurtemberg, Hesse où la Sarre seraient particulièrement concernés par ce problème.

Propositions constructives et malentendus divers

Le professeur en droit Costa Rica ne se contente pas d’une simple constatation. D’après le syndicat Education et Sciences Muños a fait sept propositions de réforme. Parmi elles figurent un soutien important de potentiels individuels et de capacités spécifiques d’apprendre, plus d’autonomie pour les écoles et une initiative pour augmenter la qualité des contenus de formation et des méthodes, qui devrait être atteinte par une formation systématique de langue des migrants, l’amélioration de la capacité de lecture et l’utilisation des nouveaux médias. De plus, Muños préconise un renforcement de la démocratisation des structures d’école, des réformes structurelles de fond, comme l’élargissement des offres de places à la maternelle et des cours les matins et l’après-midi, ou de renoncer au système scolaire à plusieurs niveaux, une réorganisation de la formation des professeurs qui devrait surtout approfondir les aspects pédagogiques, et plus d’investissements pour des programmes de formation à la petite enfance.

Le rapport d’état présente un intérêt qui dépasse l’intérêt à la situation des écoles et contribue au débat actuel sur la formation, car il s’agit finalement de savoir si l’Allemagne va tenir ses engagements sur un plan international. Muñoz est convaincu que les gouvernements allemands successifs avaient de bonnes raisons d’éviter le débat public sur les accords passés entre États et sur les engagements pris. Ils semblent penser d’avoir réalisé tous les droits de l’homme de façon « exemplaire. »

Le principe de l’unité dans la diversité ne suppose non seulement l’acceptation des accords internationaux, mais aussi une réflexion poussée et une action intérieure pour rendre compte d’un panorama interculturel toujours plus complexe.
Vernor Muñoz

Déjà le pacte international sur des droits économiques, sociaux et culturels obligerait aussi l’Allemagne de rendre à chacun l’accès à l’université possible, et ceci par l’introduction progressive de la gratuité de l’accès.(2) Donc il y aurait peu d’espace pour l’introduction de frais d’études, car un État qui a signé l’accord mentionné dans le pacte international est obligé d’assurer le droit à la formation « jusqu’à la limite de ses ressources ». Muñoz ne voit pas que cette limite aurait été atteinte.

Dans cet esprit Wassilios E. Fthenakis a ouvert le plus grand salon d’Europe de la formation à Cologne, la « didacta 2007″.

Avec 0,42% du PIB, l’Allemagne n’investit même pas la moitié de ce que préconise l’OCDE pour le domaine préscolaire. Si la république fédérale voudrait atteindre la qualité du domaine scolaire primaire et élémentaire des pays scandinaves, elle devrait multiplier par quatre ce qu’elle investit actuellement dans l’école primaire et élémentaire.

L’argument de caisses vides qui est souvent avancé n’est déjà pas valable aujourd’hui quand on regarde la situation de plus près : Des pays européens moins riches que l’Allemagne ont atteint ce niveau depuis longtemps. Et je vous rappelle que nous n’avons, même pendant des temps plus prospères, fait peu d’efforts envers les enfants. Donc ce ne sont pas les caisses vides qui nous empêchent d’investir dans la formation, mais un manque de discernement que la formation est le meilleur investissement pour l’avenir d’un pays. Investir dans les études est ainsi la responsabilité de toute la société.
Wassilios E. Fthenakis

Comme prévu, Berlin voit la chose différemment. Certes, le gouvernement admet désormais le lien entre la formation et l’origine sociale, mais pense néanmoins que l’Allemagne a pu devenir une des plus grandes puissances économiques « grace à son système de formation performant ». La conférence au ministère de la culture va faire encore plus simple. La plus grande partie de la critique serait apparemment basée sur « un malentendu », et le président de la fédération des philologues allemands, Heinz-Peter Meidinger, l’année précédente avait déjà eu l’impression que « quelqu’un serait venu non pour s’informer mais avec des préjugés bien établis ». Après tout, Vernor Muñoz se serait montré être un partisan fervent du regroupement des trois filières allemandes de l’enseignement secondaire.

Des paroles creuses face aux questions critiques

La réaction des politiques et pédagogues concernant la visite de Muñoz et le débat controversé qui en a suivi a été aussi peu loquace que l’année précedente, année de la première visite de Muñoz. Les réponses du gouvernement fédéral à une demande de plusieurs députés en mars 2006 sont paradigmatiques et semblent garder leur validité. À la question dans quelle mesure le droit à la formation serait garanti en Allemagne, la grande coalition répondait à l’époque :  » Le droit à la formation  » dans le sens d’un droit de participation à une formation générale et une égalité des chances dans des institutions publiques de formation est inscrite dans la constitution de la République fédérale d’Allemagne et ainsi assuré à tout un chacun. Cela résulte du droit de liberté (article 12, par. 1, article 2 par 1 de la constitution), en liaison avec le principe d’égalité (article 3 de la constitution).

Est-ce que le gouvernement voudrait éventuellement tirer des conséquences de la critique du système scolaire divisé dans une prochaine collaboration avec les Länder ?

Ce sont les Länder qui, d’après la distribution des compétences fixées dans le droit constitutionnel, sont responsable de l’enseignement. Cela reste valable après la réforme du fédéralisme. Dans le cadre de leurs compétences respectives, la fédération et les Länder vont continuer à renforcer le système d’enseignement.

Et quelle est la position du gouvernement concernant la thèse que la subdivision du système scolaire (dans plusieurs branches de niveau, n.d.t.) serait coresponsable dans la sélection sociale du système d’enseignement allemand ?

La responsabilité de la meilleure organisation des systèmes scolaires, en tenant compte du plus grand encouragement sur un plan individuel est portée exclusivement par les Länder, comme le précise bien la constitution. De nombreuses évaluations de la performance du système scolaire allemand, dans une comparaison nationale et internationale (TIMSS, PISA, IGLU, PISA-E, IGLU-E)(3) montrent que la question d’optimisation de l’égalité des chances est complexe pour tous. D’après l’évaluation du gouvernement, on peut constater au moins une chose : seulement un système d enseignement performant peut être un système d enseignement juste.

Droit à la formation

Suite au rapport de l’envoyé spécial des Nations Unies, l’adjointe du président de la GEW, (syndicat de l’éducation et des sciences) Marianne Demmer, a expressément fait remarquer au gouvernement, qu’ »une sempiternelle répétition de mythes conservateurs et de rhétorique de justification pour un système de formation dont sa sélection sociale a été prouvé n’impressionnerait personne au niveau international, mais n’évoquerait que d’incompréhension. »

À l’avenir, l’Allemange aura besoin d’un  » système scolaire intégratif et inclusif  » et d’une réforme structurelle profonde à la base. Par ailleurs, le droit à la formation devrait être inscrit et dans la constitution de la fédération et dans la constitution de chaque Land, la convention des Nations Unies sur les droits de personnes handicapées devrait enfin être ratifiée. Finalement, Demmer attend que la convention des Nations Unies sur le droit des enfants soit entièrement appliquée pour qu’un droit à la formation aux réfugiés et aux enfants sans status soit garanti.

La querelle sur le bon chemin dans la politique de l’enseignement se transforme en la question si le gouvernement prend au sérieux son obligation dans le domaine des droits de l’homme, et à quel point il est prêt à accepter le droit à une prise en charge optimale de la petite enfance, de la formation scolaire ou universitaire comme un droit fondamental.

La chercheuse en sciences sociales Mona Motakef a déjà essayé au printemps dernier d’avancer le débat sur toujours les mêmes reproches et résistances et d’introduire une approche  » droits de l’homme  » dans le débat de la politique de l’enseignement, qui en même temps dervrait être sociopolitique. Son étude  » Le droit de l’homme à la formation et à la protection de discrimination, de risques d’exclusions et le droit à la possibilité d’intégration  » a reçu encore moins d’attention que les explications de Vernor Muñoz.

Dans l ensemble, une approche de problèmes actuels du système d enseignement dans un contexte des droits de l’homme montre que l’école doit s’orienter beaucoup plus qu’avant à la diversité des besoins et aux points de départ des enfants et d’adolescents, si on voudrait garantir une absence de discrimination. Des stratégies qui font le pari de l’intégration sociale ne signifient non seulement un avantage pour les enfants et adolescents qui font l’expérience de la discrimination, on se doit de leur ouvrir les portes par des mesures d’intégration dans la formation pour qu’ils puissent participer à la vie en société.

L’absence de discrimination et des stratégies ouvertes dans la formation enrichissent tous car elles nes’orientent pas sur une attente de normalité, mais respectent la diversité des situations et projets de vie. La formation ferait alors fonction de la formation des droits de l’homme, si elle peut transmettre de par son contenu et sa forme aux enfants et adolescents ce que cela signifie que les êtres humains ne sont plus marginalisés et les stéréotypes perdent leur importance : car il devrait être normal, dans la formation comme dans d’autres domaines de la société, d’être différent.
Mona Motakef

(Traduction: Stephan M.)

Mes remerciement à l’auteur Thorsten Stegemann pour son autorisation de traduction et de publication.

(1) Dans le système scolaire allemand, les élèves suivent un tronc commun jusqu’à l’age de 10 ans; (de la 1ère à la 4e classe). À la fin de la 4e classe déjà, une sélection qui souvent va déterminer toute une vie professionnelle s’opère. Il y a trois niveaux scolaires dans lesquels les élèves sont triés : La Hauptschule , la Realschule et le Gymnasium (niveau bas, moyen, élevé (lycée)). Jusqu’aux années 80 environ, les élèves venant de la Hauptschule pouvaient faire un apprentissage et avaient une qualification qui leur permettait de trouver du travail. Aujourd’hui, la Hauptschule est devenue une voie de garage, et peu d’élèves réussissent le passage à une école plus qualifiante. (n.d.t.)

(2) Exactement le contraire est en train de se dérouler actuellement en Allemagne. La « réforme du fédéralisme » (plus d’autonomie pour les Länder), décidée par le parlement et la chambre des länder en juin/juillet 2006, a déclenché une vague d’augmentations importantes de frais d’inscription dans les universités, qui jadis financées par l’État fédéral sont désormais sous la responsabilité (aussi financière) des Länder. Les frais d’inscriptions ont toujours existé, mais à des niveaux raisonnables. Les universités demandent maintenant des frais d’études allant jusqu’à 500 euros par sémestre, donc 1000 euros par an, voir plus, aussi pour les étudiants issus de familles modestes. Nombre d’associations d’étudiants ont boycotté ou boycottent cette politique, mais certains université ont riposté par l’exclusion pure et simple de centaines d’étudiants. L’université d’art de Cologne par exemple a viré 269 étudiants.

Source: Der Spiegel (n.d.t.)

(3) Ce sont des méthodes d’évaluation de niveau de connaissances et de compétences (n.d.t.)

2 Responses to “Le système scolaire allemand: „extrêmement sélectif “”

  1. Marie-H dit :

    Que dire ? A trop vouloir éviter de centraliser, l’Allemagne y a perdu son âme de société d’élite qui faisait rêver beaucoup de nos célèbres écrivains. Que voulez-vous qu’il advienne d’un système où, dans un Land, on ne passe pas les mêmes examens pour l’Abitur ? Et où, selon que l’on sorte de tel ou tel Gymnasium, on peut tout simplement oublier l’idée de trouver une place dans l’université de son choix. Elitiste ? Oui, en tous points ! Surtout que même, après les études, il faut montrer ses notes à son futur employeur pour espérer décrocher un emploi …… Cela, me laisse pensive …..
    Voyez cela aussi: http://www.lagazettedeberlin.de/4036.0.html

  2. Anne Nanny dit :

    C´est du n´importe quoi ce systeme discriminatoire scolaire Allemande. La Politique Allemande responsable de systeme innaceptable et dictatoriale en tire son profit, puisque leurs decendants aurons la chance d´aller au lycée, d´avoir leurs baccalaureats et de faire de bonnes etudes, au detriments des autres enfants de parent modestes et surtout des enfants issus de l´émmigrations dont leurs avenirs sont dejá bafouer a l´age de 10 ans. Ainsi un pays soit disant une puissante democratique comme l´allemagne a t-elle le droit de foutre en l´air l´avenir des innoncents enfants? Cela est un crime et une violation des droits des enfants, meme dans les pays non democratique de regimes dictatoriale ou totalitaire les enfants ont une égalité de chance.