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09.08.2012, Allemagne, Bielefeld

Conférencier : Sönke Hilbrans

Le BigBrotherAward dans la catégorie « Instances officielles et administration » est remis au

ministre de l’Intérieur de la Saxe, Monsieur Markus Ulbig,

pour 28 interrogations du réseau cellulaire dans la région de Desde.

Le motif initial pour ce prix remonte à plus d’une année et si nous en avions déjà eu connaissance l’année dernière, le lauréat aurait été fixé depuis un an dans la belle ville de Dresde. Seulement le scandale du février 2011 n’a commencé à filtrer au public au compte-gouttes qu’à partir de l’été de l’année dernière.

Mais commençons par le début. Le 19 février 2011 20.000 hommes et femmes à Dresde faisaient une manifestation contre le rassemblement annuel nazi. Après cette manifestation notre la police de notre lauréat enquêtait sur 23 délits qui pouvaient être limités dans un intervalle de temps et qui auraient eu lieu à 14 endroits bien localisés.

Sur suggestion de la police et de la chambre criminelle de la Saxe le parquet de Dreste demanda la remise de données de communications de la téléphonie mobile. Peu après toute une montagne de données se mettait en mouvement. Des données de cellules radio pour trois positions dans la région de Dresde et sur plusieurs heures furent demandés pour la chambre criminelle saxonne. Là-dessus se sont rajoutées les données de communication de tout le quartier sud du centre-ville de Dresde où des manifestations ont eu lieu, les données de communication pour pas moins de 12 heures et finalement pour les environs d’une maison dans laquelle se trouvaient une maison des jeunes, des bureaux de partis politiques et un cabinet d’avocats et puis des données de communication pour pas moins de 48 heures. Les opérateurs de téléphonie mobiles ne se sont pas fait attendre et ont transmis en tout et pour tout 1.007.702 enregistrements pour 323.503 numéros de portables à l’autorité chargée de l’enquête.

Cette affaire n’était pas restée longtemps en cachette, déjà l’été 2011 les données recueillies s’étaient retrouvées là où elles n’avaient pas lieu d’être, à savoir dans des enquêtes pour lesquelles on n’aurait certainement pas eu l’autorisation de les avoir. Il y avait des concernés qui, à leur grand étonnement, pouvaient lire qu’ils avaient téléphoné à une heure précise, à un endroit précis lors de la manifestation. Cela a soulevé des questions.

Le gouvernement, peinant à trouver une réponse n’a, dans un premier temps avoué l’identification de seulement 460 enregistrements, mais quelque temps plus tard en juillet 2011 on avait déjà identifié 40.732 détenteurs et détentrices de téléphone portable. Le nombre avoué d’enregistrements de données de communication augmentait de jours en jours, pour arriver le 23 novembre 2011 au nombre de 1.067.433.

Ces données ont majoritairement été recueillies le 19 février 2011 entre 7h et 19h et cela dans un espace dans lequel se trouvaient 100.000 habitants, d’après une estimation policière 20.000 manifestants et 6.642 fonctionnaires de police. On appelle cela un tsunami de données et ce n’était pas pour rien que l’on parlait d’un « Fukushima saxon ».

Qu’est-ce que cela voulait dire ? Une toute petite quantité de données a été demandée pour élucider des délits concrets. La grande masse des données devrait servir à enquêter sur des membres supposés d’une association criminelle d’une dimension tout à fait limitée. Quel sens cela a de vouloir chercher une ou deux douzaines de gens d’un groupe dans plus d’un million d’enregistrements ? La police saxonne dont la plus haute autorité était le lauréat, le ministre de l’Intérieur Markus Ulbig, voulait manifestement chercher la célèbre aiguille dans une botte de foin. Malheureusement, Monsieur Ulbig, vos criminalistes ne cherchent pas dans une botte de foin, mais dans la sphère privée de la communication de dizaines de milliers de citoyens et citoyennes, sphère qui est particulièrement protégée par le secret des télécommunications. Et ces citoyens et citoyennes n’étaient pas dans le centre-ville de Dresde seulement pour rigoler, mais parce qu’ils y vivent et travaillent. Cette affaire est particulièrement délicate, car quelques milliers de citoyens étaient là pour une raison bien précise qui est d’user de leur droit fondamental au rassemblement afin d’exposer une demande sociétale et exprimer leur dégout des néo-nazis qui parcourent la ville. La police saxonne s’est procurée les données de communication de tous les participants de la manifestation qu’elle peut désormais exploiter : qui était là ? De quelle heure à quelle heure était-il là ? Avec qui a-t-il téléphoné ? Comment et dans quels groupes ont-ils bougé ?

Ce que la police saxonne a réussi avec les interrogations des cellules radio n’était rien d’autre qu’une « spontanée conservation des données de communication ». La Cour fédérale constitutionnelle n’avait-elle pas rejeté il y a seulement un an la législation de la conservation des données de communication ?

Le chargé de la protection des données de la Saxe que l’on pourrait nommer la voix de la raison du Land, bouleversé, a dû constater que manifestement l’on ne s’était pas soucié de la proportionnalité des moyens.

Notre lauréat n’est pas quelqu’un qui vient de l’appareil sécuritaire, c’est un homme de l’administration. Sur le site internet de son ministère il se vante d’être de la région et d’avoir été maire d’un chef-lieu de canton : « Proche des gens et à leur écoute ». Pourtant, il a manqué d’esprit terre-à-terre et de discernement, il défendait ses fonctionnaires avec ténacité. Ainsi il a offert à la Saxe un débat indigne dans lequel il s’est avéré que la boulimie des données a des complices. Le lauréat disait que l’on ne pouvait pas faire de reproches à ses fonctionnaires, car c’étaient les procureurs qui avaient demandé les interrogations des cellules radio et les juges qui les avaient ordonnées. S’étant défaussé sur les procureurs et les juges, ceux-là répliquaient qu’ils n’avaient pas à subir de critique de protecteurs de données. Personne ne voulant porter le chapeau, les données ne sont, à ce jour, toujours pas effacées.

À la charge de notre lauréat aussi le manque total d’entendre raison dans les 14 derniers mois ce qui concerne également ses complices. Jusqu’à la fin on cherche des abonnés, pendant que les gens concernés ne doivent pas apprendre qu’ils sont l’objet d’une méga enquête.

Toutes nos félicitations, Monsier le Ministre d’État Markus Ulbig !

Source : bigbrotherawards.de

One Response to “BigBrotherAward catégorie « Instances officielles et administration »”

  1. Stephan M. dit :

    C’est la première traduction des textes des BigBrotherAwards 2012 de l’Allemagne. D’autres vont suivre dans les prochaines semaines.