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(Une caisse d’assurance maladie qui assure)

25 septembre 2008

La plus grande caisse d’assurance maladie d’Allemagne relevant du régime obligatoire[1], la BARMER, a voulu aller plus loin dans son souci permanent d’aider les entrepreneurs dans leurs démarches administratives : sur son site internet, elle proposait des téléchargements de lettres types destinés aux entreprises souhaitant licencier un salarié handicapé ou une salariée enceinte. Un service client exemplaire dans l’ère du capitalisme.

Le sujet est délicat, mais cela ne veut pas dire qu’il n’y ait personne qui s’intéresserait à la question. Qui n’a pas déjà lu, entendu, senti ou compris que le salarié serait parfois davantage une charge financière qu’une contribution au profit de l’entreprise, qui a la bonté d’offrir du travail au citoyen ? Les politiques l’ont compris depuis longtemps, d’où les nombreuses aides financières de l’État pour soulager les souffrances du patronat.

En Allemagne, les salariés pèsent non seulement sur le budget des entreprises, mais aussi sur le budget des caisses d’assurance maladies. C’est le cas des handicapés et des femmes enceintes. Par exemple, l’assurance maladie et l’entreprise doivent se partager les frais engendrés par le congé de maternité obligatoire de la salariée enceinte qui (malheureusement ?) est protégée par la loi. La loi de la protection maternelle garantit la continuité du salaire intégral de la femme enceinte pendant la période d’interdiction de travail (6 semaines avant et 8 semaines après l’accouchement).

En quelque sorte, l’entreprise et l’assurance maladie pourraient trouver un « intérêt commun » dans le licenciement d’une femme enceinte. Mais cette éventualité, complètement hypothétique, est évidemment impensable, inconcevable. Comment pourrait-on prêter une telle intention à un organisme habité d’altruisme dont la mission est de protéger ses membres ?

Néanmoins, les faits sont là, pardon, étaient là. Sur le site internet de la Barmer, il y a une rubrique avec des informations concernant les droits et les devoirs dans le cadre d’un emploi. Parmi ces informations fort utiles, on trouve des lettres types pour faciliter la correspondance entre employeur et employé : des questionnaires, formulaires etc. Et parmi ces documents, il y a(vait) des lettres types. Der Spiegel a eu la gentillesse de faire des copies d’écran et les a mis sur son site pour permettre aux internautes incrédules de vérifier qu’ils ne se sont pas fait avoir par de fausses rumeurs ou des affabulations. On trouve donc toute une liste : avertissement, avertissement pour une absence non justifiée, avertissement pour un travail supplémentaire non autorisé, …, licenciement d’une femme enceinte ou d’une mère, demande de licenciement d’un grand invalide, licenciement extraordinaire,…. L’employeur n’a plus qu’à télécharger la lettre, compléter les éléments manquants comme nom, adresse, date etc., puis l’envoyer. C’est vraiment bien fait, pratique, simple, efficace.

Les lettres types étaient téléchargeables jusqu’au 9 septembre. Après être contactée par Der Spiegel qui voulait connaître la raison du service exceptionnel, et après une vague de protestations que ce service a déclenchée, la caisse maladie a rapidement retiré les plus problématiques de ces documents. L’expert de santé, Karl Lauterbach (SPD) s’exprime :  » La dernière chose dont un salarié aurait besoin est un guide pratique à l’aide duquel son employer peut rendre son système disciplinaire plus efficace. »

Et pourquoi donc – l’entreprise a aussi besoin d’un coup de main de temps en temps, non ? Pour la Barmer, ces « aides » partaient d’une bonne intention. « Notre service est aussi là pour les petites entreprises qui sont également nos assurés« , dit une porte-parole de la caisse maladie. « On nous demande souvent ce type de renseignements, cela nous a montré que ces conseils sont d’une grande importance pour nos clients. Seulement la bonne intention ne donne pas toujours un bon résultat », telle est sa prise de position. « Apparemment, notre service a été un malentendu. Nous le regrettons. »
D’ailleurs, toutes les lettres types ne sont pas retirées, seulement les plus « problématiques ».

(Personnellement je crois ce service a été « trop bien » compris. Je comprends qu’ils regrettent.)

Quelque temps avant cet incident, la Barmer a déjà été critiquée dans les médias pour des « primes de non-départ ». Environ 25,000 assurés avaient reçu une prime de 220 euros, s’ils s’engageaient à rester jusqu’à la fin de l’année 2009 et à participer à des enquêtes. Cela a été découvert le mois dernier (août 2008). Le Service Fédéral des Assurances a jugé que c’était de la concurrence déloyale et a désapprouvé cette pratique. D’autres caisses maladie s’en étaient plaintes. Le « programme de service-conseil » de la Barmer avait coûté 3,7 millions d’euros. Pour la Barmer, ce service n’a pas été une prime pour rester. Elle aurait seulement voulu savoir pourquoi nombre de ses assurés la quittent. La Barmer a également nié que la prime aurait atterri principalement chez des assurés aisés.

J’informerais bien volontiers la Barmer, surtout pour la bagatelle de 3,7 millions d’euros, car sur les raisons de départ de nombre de ses membres, j’ai ma petite idée. Si ma caisse maladie conseille mon employeur comment il peut me licencier plus facilement, cela me donnerait probablement aussi envie de m’assurer ailleurs. Mais c’est certainement trop simple comme raisonnement. Il vaut mieux faire une enquête.

Sources : sueddeutsche.deSpiegel onlineformulairestz-online


[1] Le système d’assurance maladie allemand est organisé d’une autre façon que le système français. En France, c’est la Sécurité Sociale qui rembourse environ deux tiers des coûts des soins médicaux. Ensuite, il y de nombreuses Mutuelles qui remboursent ce que la Sécurité Sociale ne prend pas en charge. C’est l’assuré qui a (au moins théoriquement) le choix de prendre une mutuelle ou pas.
En Allemagne, il y a environs 200 « Sécurités Sociales  » différentes. Ces « Sécurités Sociales » sont des assurances maladies publiques [du système solidaire] relevant du régime obligatoire. Elles remboursent presque intégralement les soins médicaux. Si le niveau du salaire d’un assuré est suffisamment élévé, le salarié a la liberté de sortir du régime obligatoire pour choisir une assurance maladie privée qui remplace l’assurance maladie obligatoire.

Il y aurait beaucoup de choses à dire le système de santé en Allemagne. Je réserve ce sujet pour un billet ultérieur.

5 Responses to “Comment licencier un handicapé ou une femme enceinte ?”

  1. Stephan M. dit :

    Je viens de faire une recherche sur le site de la Barmer – j’ai cherché le mot « Kündigung » (licenciement). Le site renvoie une page de démenti:
    BARMER contredit les intentions qui lui sont imputées. Chez la Barmer, les familles sont, sans ambiguïté, le centre de nos préoccupations. [...] Nous regrettons …

  2. nini dit :

    Je viens de me faire lourder après 1 an et 5 mois de bons et loyaux services d’une boite bavaroise.Ambiance merdique, manipulations, injustices, magouilles…moi en arret maladie 4 semaines, puis 2 et a mon retour, licenciement en force. On me tend sous le nez un contrat a l amiable, en me gueulant dessus. On me parle comme a un chien, on m empeche d acceder a mon poste de travail, je crie, pleure. On me parle en allemand ou en anglais, on me dit qu in ne veut plus de moi, que je suis le probleme…etcJ arrete la…Je suis seule ici, ne parlant pas bien la langue, je me sens vraiment mal après ce traitement…tout ca sous les yeux des autres, qui n ont pas bronché…L Allemagne n est pas un Eldorado, et surtout pas la Baviere.La mentalité au boulot, pour la plupart, pue, pue encore plus qu en France. Je suis demunie et degoutee.

  3. Stephan M. dit :

    Bonjour,

    je suis vraiment désolé pour ce que vous avez dû subir dans cette entreprise. Ce que vous décrivez relève du harcèlement moral, c’est une expérience traumatisante. Quand vous ecrivez « … j’arrête là » c’est probablement la moins pire solution si on veut préserver ce qui reste de sa santé.
    Dans le cas du harcèlement moral, c’est du plus classique que l’on ne trouve pas de collègues prêt à aider, à témoigner, car soit ils ont peur de se faire licencier à leur tour, soit ils sont dans le « clan » des harceleurs. Cette entreprise, est-elle dans une grande ville ou à la campagne ?

    Qu’allez-vous faire maintenant ? Rentrer en France ?

    En tout cas je vous souhaite que vous puissiez vous remettre bientôt de ce choc et que vous soyez soutenu par vos proches.

  4. CHLOEE dit :

    nini
    incroyable, j aurais pu ecrire ce mail a ta place..
    mon employeur a appris par une denonciation d un de mes collegues … que je suis en essai de BB… mon employeur, une banque allemande a Hamburg, s est mis en tete.. »de me faire partir avant que le probleme arrive » ils ont dit cela en face de ma secretaire…
    du coup, ma vie a changé.. harcelement morale, caracterisé…
    ils m ont offert 4 mois d indemnités de licenciement si je pars… j ai refusé.. et donc ma vie est un enfer…
    avec le stress, je n arrive pas a tomber enceinte, mais j avoue que cela m aiderait.. je trouverai bien un medecin allemand qui me mettra en arret maladie…

    quels sont nos droits en allemagne, en france, si tu arrives a caracterisé le harcelement tu peux obtenir jusqu a un an indemnité…

    je ne sais plus quoi faire..
    c est la crise il n y a pas d emploi…

    j avoue que j ai une image tres moyenne des allemands.. malheureusement mon experience est tres douloureuse… j ai hate d en connaitre d autre.. j ai hate d etre enceinte.
    tout le courage pour toi…
    donne moi de tes nouvelles

  5. lépine dit :

    jai etait licencies en de 2008 et j etait indemnise mais il non pas paie le reste de mais conges paieque faire merçie