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Dans un des nouveaux Länder en Allemagne, Saxe-Anhalt, un projet pilote a été lancé pour faire une réponse au chômage de longue durée. 503 chômeurs concernés ont accepté une proposition d’un « travail citoyen ». Il s’agit d’un travail de 30 heures par semaine, financé entièrement par l’argent public. Le salaire brut se situe entre 675 et 975 euros brut, comme un peu lire dans l’article du Monde. Ce type de travail doit respecter certaines conditions : ne pas concurrencer des emplois existants ou potentiels. Il se situe le plus souvent dans un cadre associatif ou social, et il doit servir l’intérêt général. Une femme de 40 ans, au chômage depuis 2003, ancienne travailleuse dans une usine d’emballage, témoigne : « J’ai repris confiance en moi, je me sens de nouveau utile », son travail est d’aider des personnes âgées, faire leurs courses et leur tenir compagnie. Son employeur, le responsable d’une résidence pour personnes âgées, voit la mesure d’une façon positive, car il peut offrir des services aux résidants qui ne seraient pas remboursés par la sécurité sociale.

D’autres voix sont moins enthousiastes : celle du maire de la ville Barleben qui craint que la mesure ne devienne qu’une mesure subventionnée comme les autres. Berlin envisage de faire la même chose, car d’après une enquête menée par la BA (1) qui expérimente le projet, cette mesure coûterait 35% de moins que les allocations qui sont versées aux demandeurs d’emploi. Les chômeurs visés par ce projet sont ceux qui n’ont pas de vraies perspectives sur le marché du travail. Des sanctions sont prévues si ces propositions sont refusés : allocations réduites ou leur suppression totale.

Sur le journal internet allemand newsclick.de, on trouve quelques informations supplémentaires : Ces contrats sont limités à un an, mais une possibilité d’un contrat à durée indéterminée est envisagée. Rainer Bomba, l’inventeur du projet, est enthousiaste et voit son projet appliqué au niveau national. C’est exactement cette remarque qui alerte Monsieur Paqué, professeur d’économie et membre dirigeant du parti FDP (2), parti (ultra )libéral. « C’est un travail financé à 100 % par l’argent public, et il serait naïf de croire que ce type de travail ne remplacerait pas des emplois existants. »

Quelle est la différence avec un travail à un euro, mesure coercitive pour les chômeurs allemands ?

travail citoyen job à 1 euro
contrat de travail pas de contrat
cotisations sociales pas de cotisations
1 ans 9 mois

revenus probablement égaux

Les deux mesures sont coercitives, donc déjà ce point reste à mes yeux très problématique. Même si il y a un contrat de travail dans le cas du travail citoyen, je m’interroge sur les conditions concernant le droit du travail. Je rappelle les conditions du travail à un euro, qui échappent à tous les droits élémentaires : pas de droit de grève, en cas de maladie, le  » salaire  » est suspendu, mesure coercitive. De quelle nature est le contrat du travail citoyen?

En ce qui concerne le revenu, un calcul sommaire est vite fait (cas d’un ménage d’une personne):

Travail à 1 euro :

Alg1 (allocation chômage) : 345 euro
120 heures x 1 euro : 120 euros
Allocation loyer : ~ 250 à 300 euros
Total : 715 à 765 euros

Travail citoyen :

Salaire brut entre 675 et 975 euros. Il faut savoir que le brut allemand est le salaire avant avoir soustrait les cotisations sociales et les impôts. Dans le brut français, les cotisations sociales sont incluses, mais pas les impôts. Donc il faut enlever un pourcentage du salaire du travail citoyen, avant qu’il arrive sur le compte bancaire.

Après il faudrait savoir, si le travailleur citoyen peut avoir une allocation de logement, et quel sera le montant. Vu ces éléments, le travail citoyen est un travail à 1 euro  » amélioré  » dans la mesure qu’il n’est peut-être plus complètement hors du droit du travail. Qu’en est-il du droit de grève et le cas de maladie ? L’aspect de contrainte pose aussi la question du droit de démission.

Quand on consulte le résultat d’une recherche approfondie de l’impact et des conséquences du travail à un euro, et sur le marché du travail et sur la vie des demandeurs d’emploi, je renvoie au billet « Allemagne, travaux sociaux d’intérêt général« . Je reste donc plus que réservé sur ce type de mesure. Si le travail citoyen se développe sur le plan national, on aura, certes,  » moins de chômeurs », mais l’État aurait officiellement instauré une sous-classe de travailleurs, avec les conséquences que l’on connaît du travail à un euro : baisse des salaires, suppressions d’emploi en les remplaçant par les travailleurs citoyens, quelques sociétés de services qui poseront le bilan, étant concurrencées par l’État.

Le Wikipedia allemand fait quatres objections contre le travail à 1 euro :

  1. La question de la compatibilité avec le droit pénal, dans lequel un travail obligatoire est prévu comme une peine de remplacement pour une personne condamnée.
  2. Une dégradation des possibilités sur le marché du travail
  3. La création artificielle de tout un secteur de bas salaires
  4. La contrainte de la précarité, et certaines parallèles avec le « Reichsarbeitsdienst » (travail obligatoire dans le troisième Reich, que chaque jeune homme devait faire avant son service militaire)

Les mêmes réserves sout tous valables pour le travail citoyen.

(1) : Bundesagentur für Arbeit – Agence fédérale pour le travail
(2) : Freie Demokratische Partei – Parti démocrate libéral

One Response to “Projet pilote en Saxe-Anhalt : travail citoyen”

  1. hana dit :

    ouai c est le cui francais quoi a par que nous c est deux ans